• 25 NOVEMBRE 2010 : « UN QUÉBEC EN PANNE DE SON HISTOIRE ET DÉPOUILLÉ DE SES RÊVES !

    UN QUÉBEC EN PANNE DE SON HISTOIRE  ET DÉPOUILLÉ DE  SES RÊVES ! 
                                         UNE HISTOIRE QUI N'A PLUS LA COTE

    source : http://www.ismenetoussaint.ca/ArticleView.php?article_id=299

    «L'enseignement de l'histoire est déficient au collégial et aussi au secondaire » dénonce le président de la Société Saint-Jean-Baptiste, Mario Beaulieu. «La situation actuelle est inquiétante et nécessite une intervention d'urgence du gouvernement», renchérit le président de la fondation Lionel-Groulx, Claude Béland, qui souligne qu'une pétition circule actuellement sur ce sujet. Quand on étale de telles données sans se compromettre dans les considérants, on ne suggère pas de stimuler le débat à cet égard dans l’espoir de corriger une lacune désolante et de remettre l’histoire au programme. On impose plutôt une conclusion par induction et on sollicite l’adhésion de tous à ce constat sans prendre le temps de s’expliquer ! On décrète l’état d’urgence, on secoue l’épouvantail à moineaux et on suggère d’en appeler au Parlement qui est le coupable tout désigné.

    Où est le débat ?

    Des statistiques qui mériteraient d’être questionnées sévèrement

    Aujourd’hui, qui oserait contester ce fait criant, l’histoire n’a plus la cote dans nos écoles. Cela étant, où ce mal endémique prend-il ses premières racines ? À qui la faute ? Au gouvernement décadent de Jean Charest ? Au système d’éducation tout aussi décadent qui a comploté avec les différents gouvernements pour sortir l’histoire de ses programmes ? Aux cégeps auxquels on fait porter l’odieux d’être devenus des halls d’attente ? Ou à la paresse intellectuelle d’une jeunesse qui s’est dangereusement enfermée dans le présent ? Et vu que nous y sommes, dans cette dénonciation qui pointe du doigt uniquement les carences criantes du secondaire et du collégial, où sont les universités ? Après avoir vidé leur programme de ce qui faisait naguère leur force (les sciences humaines), pour se concentrer à la création de la richesse, ces maisons du haut savoir n’ont-elles rien à se reprocher ? Faut-il les soulager de toutes responsabilités parce que les cris qu’on entend sortent justement de ses murs ?

    Si vous voulez mon avis, 23% de cégépiens (toutes origines confondues !) qui s’initient aux valeurs de l’histoire tous azimuts, ce n’est quand même pas rien dans un Québec qui se multiculturalise dangereusement ; dans un Québec qui n’a de cesse de s’angliciser et qui, bêtement, laisse toute la place aux derniers arrivants qui apportent avec eux une mémoire qu’un odieux système d’éducation, au nom d’une fausse ouverture d’esprit, a entrepris d’inscrire dans son registre ! À mon point de vue, le problème n’est donc pas tant dans le nombre (relativement faible) des étudiants inscrits dans ce programme que dans la somme et la nature des efforts consentis de part et d’autre. Par voie de conséquence, une réplique viable à la décadence de la pensée historique chez nous ne peut se retrouver que dans la qualité d’une démarche académique authentiquement québécoise, dans la stimulation des esprits par ceux qui sont mandatés pour le faire, et dans la manière de redonner à l’Histoire avec un grand « H » toutes ses lettres de noblesse. Mon premier souci est, de fait, celui de l’excellence ! La qualité et l’authenticité y étant, les premiers intéressés sauront bien y trouver leur compte et les autres devront bien s’ajuster au passage.

    C’était le bon temps !

    Lorsque j’étais au cégep de Jonquière, en 1969 et 1970, la question ne se posait même pas. Ceux et celles qui voulaient faire un bout de carrière dans cette discipline à la mode, s’engageaient pour trois ans. C’était un passage obligé pour s’inscrire dans un programme de sciences humaines et pour poursuivre dans cette même voie à l’Université, jusqu’à l’obtention de son diplôme de Premier cycle Ès Lettres ou Ès Histoire. Nous avions des cours de politique, de sociologie, de géographie, de philosophie et, évidemment, d’histoire. On y allait ou on n’y allait pas ! Si on y allait, on en sortait enrichi par la grande porte de l’excellence. On arrivait grandi, nourri d’un idéal commun qui entretenait une fierté simple et collective pavant la voie au projet de société qui a meublé l’esprit de la Révolution tranquille et stimulé le débat nationaliste, de part et d’autre. Nous apprenions à revendiquer en même temps que nous apprenions à mesurer nos connaissances et soupeser les idées des autres dans le chaos du débat dont nous respections passablement bien les règles.

    C’était le bon temps et on ne le savait pas. Nous n’avions même pas besoin d’y penser. Les choses étaient selon ! Nos aptitudes et nos goûts pour l’histoire et les sciences humaines en général marquaient la voie. Si on y allait, le cégep, par la richesse de son programme, avait de quoi offrir. Il préparait les esprits pour l’université qui avait, pour double mission, de compléter leur formation et de les aider à s’épanouir par ce créneau. Les institutions supérieures d’enseignement avaient alors une préoccupation souveraine : l’éducation, point à la ligne. Elles n’étaient pas à vendre. Elles ne s’étaient pas fondues dans les projets de la haute finance internationale qui a fini par s’emparer des rouages institutionnels, des leviers économiques et de la destinée du Québec.

    La démarche des institutions d’enseignement supérieur s’inscrivait dans le souci de libérer l’histoire du Québec des tutelles idéologiques archaïques qui lui bloquaient l’accès à la modernité. Elles formaient les esprits simples qui, à leur tour, meublaient l’esprit de la nation, et elles les invitaient à construire, par leur questionnement et leurs apprentissages, la société de demain.

    Un Québec malade de son histoire, de ses institutions et de ses élites

    En ce temps-là, les universités québécoises, par la qualité et la richesse de leur programme, stimulaient les besoins et les appétits de l’ensemble du réseau scolaire, de la première année à la fin du collégial. À ce titre, l’université représentait aux yeux de tous un indéniable attrait, l’ultime rendez-vous des intellectuels en devenir. En ce temps-là, la mémoire portait un sens qui allait dans celui de la nation québécoise qui se vantait, à juste titre, d’être d’abord et avant tout Canadienne française et surtout pas multiculturelle. Les arrivants prenaient le temps de dire bonjour avant de s’installer à demeure. Ils prenaient plaisir à noter les us, les coutumes et l’histoire de leurs hôtes. Ils apprenaient bien le français et ils acceptaient de faire l’effort de s’adapter, comme il se doit, à la société d’accueil. Les peuples fondateurs, Canadiens français, Métis et Indiens pour les bien nommer, leur faisaient de la place, et la suite de l’histoire du Québec s’écrivait d’elle-même, en français s’il vous plait, grâce aux efforts et dans le respect de tous.

    Au fil des années, les cégeps et les universités ont abandonné leur humanisme et la mission pour laquelle ils ont été créés. Ce que nous vivons et déplorons aujourd’hui à ce titre, c’est le fruit d’une longue et lancinante dérive à laquelle nous nous sommes collectivement soumis. Au lieu d’écrire l’Histoire comme le font tous les peuples en marche, nous la subissons et diminuons de pair tous ses attraits et nous nous abandonnons à l’idée que les autres se font de nous.

    De fait, qu’on me permette de dire encore que si les choses ont changé pour le pire dans cette histoire décadente, que si le peuple a perdu l’amour et l’intérêt de son histoire, on le doit aussi, et un peu beaucoup, aux élites Canadiennes françaises les plus en vue, chercheurs et professeurs d’histoire en tête qui, aux premiers lendemains de l’effondrement référendaire de 1995, ont lâché leur propre peuple dans les latrines de son histoire sans se soucier de ce qui allait advenir de lui dans le salmigondis d’un multiculturalisme dénaturant. D’un multiculturalisme version québécoise qu’ils (les élites) se sont appliqué à redéfinir dans les conclusions d’une commission nationale sur les « Accommodements raisonnables » où il a été officiellement reconnu que le simple fait de s’afficher comme membre du peuple fondateur de ce pays en devenir était désormais perçu comme une honte et une infamie. Avec un tel gâchis, faut-il se surprendre aujourd’hui du fait que les trois quarts des cégeps n’aient plus rien à offrir en histoire à leur clientèle et de savoir que la majorité des collégiens « ne possèdent pas les connaissances minimales sur leur propre société » ?

    À cet égard, je suis de plus en plus porté à penser que si le Québec a fini par perdre l’intérêt de son histoire, c’est qu’il en a perdu le fil et le goût et qu’il ne s’y retrouve plus. Et s’il ne s’y retrouve plus, c’est qu’on l’a dépouillé de son sens sans tenir compte de la nature profonde de ses rêves et sans le respecter pour ce qu’il est. À l’origine, je m’en souviens, nous étions liés par une langue, une culture, une fierté et un rêve communs dans lesquels tous les Canadiens français se retrouvaient en première ligne. Aujourd’hui, ce lieu commun n’existe plus et l’intérêt pour notre histoire nationale est parti comme les feuilles de nos érables à l’automne prenant. Il s’est perdu dans les petites ambitions des élites, des institutions et des opportunistes qui ont été bien loin de se soucier du fait qu’ils sciaient la branche sur laquelle ils étaient assis et que, eux aussi, auraient un jour à faire face aux rigueurs de l’hiver intellectuel qu’ils préparaient…

    Akakia (Les Délires d'Akakia, 25 novembre 2010, http://akakia.blogspot.com)


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