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    Plan Nord - Un projet qui devrait satisfaire tous les autochtones

    Éric Cardinal, spécialiste des questions autochtones et consultant auprès des Premières Nations  30 novembre 2011  Québec
    Quand le premier ministre Jean Charest vante les mérites du Plan Nord, il affirme que ce sera bon pour tous les Québécois. Dans son discours prononcé ce lundi devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, il a notamment déclaré que «les grands gagnants sont en Montérégie», ajoutant que «le Plan Nord, c'est pour tous les Québécois». Fort bien, mais pourquoi alors le Plan Nord ne serait-il pas bon pour tous les autochtones?

    Il faut savoir que les programmes gouvernementaux destinés aux Premières Nations du Québec (santé, éducation, logement, aide sociale, etc.) sont essentiellement financés par le gouvernement fédéral. Ainsi, même si le Québec réalisait des surplus budgétaires grâce au Plan Nord, ce sont les écoles du réseau québécois qui en bénéficieraient, pas les écoles des Premières Nations, lesquelles continueraient d'être financées de la même façon par le gouvernement fédéral.

    Vous me direz que, dans son Plan Nord, le gouvernement Charest promet d'aider les communautés autochtones concernées. Peut-être, mais le gouvernement a unilatéralement choisi les communautés qu'il aiderait et a délibérément exclu un grand nombre de communautés qui sont pourtant touchées par les projets actuels ou futurs du Plan Nord.

    Des exemples: les communautés atikamekws de la Haute-Mauricie et des Laurentides, ainsi que les communautés algonquines de l'Abitibi-Témiscamingue. Il est vrai que leurs réserves se situent au sud du territoire d'application du Plan Nord, mais leurs terres ancestrales (sur lesquelles ces communautés détiennent des droits ancestraux) chevauchent le territoire du Plan Nord. Cette exclusion discrétionnaire du gouvernement est d'autant plus surprenante que l'État québécois a une obligation constitutionnelle, confirmée par la Cour suprême du Canada, de «consulter et accommoder» les communautés autochtones pour tout projet qui risque d'affecter leurs droits ancestraux revendiqués. Cette obligation vaut pour ces communautés dans le cadre des projets du Plan Nord.

    Absence de dédommagement

    Là où la position du gouvernement est encore plus inexplicable, c'est dans le dossier des communautés innues de la Côte-Nord. À l'exception d'une communauté (Nutashkuan), aucune autre communauté innue de la Côte-Nord a adhéré au Plan Nord. Au contraire, cinq d'entre elles, représentant plus de 70 % de la population innue vivant au Québec, ont clairement exprimé leur opposition au projet de développement du Nord sans leur participation.

    Cette opposition repose sur deux raisons: la première est que contrairement aux nations crie, inuite et naskapie, les Innus de la Côte-Nord n'ont pas été dédommagés pour les dommages causés par le développement hydroélectrique.

    On a récemment beaucoup entendu parler du cas de Pessamit, dont la communauté réclame 5 milliards alors que le gouvernement du Québec offre 350 millions. La somme réclamée par Pessamit semble exorbitante, mais on oublie de préciser que c'est sur le territoire ancestral de Pessamit que s'est construit tout le réseau de barrages Manic-Outardes. On y retrouve pas moins de 13 barrages, fournissant plus du quart de la production hydroélectrique totale du Québec.

    Pour réaliser ces barrages, il a fallu créer des réservoirs, inonder des milliers d'hectares, construire des routes, etc. Tout ça a provoqué des effets dommageables irréparables pour les Innus.

    Pas de négociation

    La deuxième raison qui explique le refus de certaines communautés innues à participer au Plan Nord est l'absence d'une table de négociation territoriale avec les gouvernements du Québec et du Canada. Seulement trois communautés innues, dont les deux qui adhèrent au Plan Nord, sont présentement engagées dans un processus formel de négociation territoriale. Ce processus leur offre une certaine protection que les autres communautés autochtones n'ont pas.

    D'ailleurs, combien de communautés autochtones qui ne sont ni signataires de traités ni en négociations territoriales, adhèrent au Plan Nord de Jean Charest? Aucune! Toutes les communautés associées au Plan Nord sont soit des communautés innues assises à une table de négociation, soit des communautés cries, inuites et naskapies bénéficiant du régime juridique particulier de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois.

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    Éric Cardinal, spécialiste des questions autochtones et consultant auprès des Premières Nations
     

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